© Yann Riou / polaRYSE
Sponsoring de courses, aide à la formation, mise à disposition des ports : la région Bretagne est particulièrement active en matière de course au large. Le point avec Pierre Pouliquen, vice-président du conseil régional de Bretagne en charge du sport, de la jeunesse et de la vie associative.
Transat CIC, Arkea Ultim Challenge-Brest, Route du Rhum-Destination Guadeloupe, Solitaire du Figaro Paprec… la Région Bretagne est aujourd’hui partenaire de nombreuses grandes courses, pourquoi avoir fait ce choix ?
La voile, c’est l’histoire et l’ADN de la Bretagne, on a forcément un rôle à jouer. Depuis 2004 et le changement de majorité au conseil régional, cet engagement est devenu plus important, parce que nous avons à cœur d’encourager cette filière d’excellence. Depuis les dernières élections en 2021, c’est d’ailleurs la première mandature où il y a un élu vice-président pour la course au large (pour le nautisme, NDLR). Aujourd’hui, les courses représentent un budget pour la région entre 1,2 et 1,8 million d’euros par an, selon ce qu’on inclut dans le calcul, car nous avons aussi récupéré la gestion des ports.
Quel est le retour sur investissement pour la Bretagne avec ces événements ?
Il y a bien sûr le prestige d’avoir tous ces marins de talent, ces belles images, les retombées économiques énormes pour les villes de départ, et là, je pense forcément à l’exemple de Saint-Malo avec la Route du Rhum-Destination Guadeloupe. Mais il n’y a pas que le « bling bling », sinon en comparaison, il y aurait d’autres sports où les retombées pourraient être certainement plus importantes. Soutenir la course au large, ça veut aussi dire soutenir toute la filière derrière, dont la fameuse Bretagne Sailing Valley. En tout, ce sont 226 entreprises en Bretagne, 2 600 emplois dont 1 100 dédiés à la compétition, 486 millions d’euros de chiffres d’affaires, dont 116 millions pour la filière compétition… Et puis il y a ce qui n’est pas quantifiable, les valeurs de solidarité, de persévérance, de résilience, que nous aimons voir associées à notre territoire.
Prévoyez-vous d’amplifier ces partenariats à l’avenir ?
Nous avons beaucoup de demandes pour des événements, on ne peut pas répondre à toutes les sollicitations. Ce qui est sûr, c’est que l’argent public va devenir rare, les partenariats publics-privés sont donc des formules particulièrement intéressantes pour nous. Nous avons la volonté d’accompagner des courses dans chaque département, pour susciter de la complémentarité plutôt que de la jalousie. Mais plus les organisations sont nombreuses, plus les enveloppes sont petites, donc il faudra faire des choix. Et voir où notre soutien est vraiment le plus utile, comme par exemple sur la formation.
Est-ce la raison de votre engagement dans le dispositif Région Bretagne-Crédit Mutuel de Bretagne sur le circuit Figaro Beneteau ?
Oui, c’est vraiment l’axe prioritaire de notre projet politique, et nous sommes ravis des résultats depuis 2020. Pour une participation de 465 000 euros par an, nous permettons à des jeunes de se former et de faire des carrières incroyables, mais aussi de promouvoir la mixité. Quand on voit les résultats d’Elodie Bonafous et de Chloé Le Bars, les deux skippers passées par la filière, on ne peut qu’être fiers !
Une récente étude menée sur les retombées économiques de la course au large à Lorient montre la montée en puissance du secteur, mais aussi ses limites, avec notamment un problème de saturation du site, comment y remédier ?
Il y a bien sûr des questions à se poser, et c’est sain de le faire. Le site de Lorient est extraordinaire grâce à des décisions politiques très fortes. Mais il ne faut pas que ce modèle de réussite se retourne contre nous. Notre responsabilité environnementale est majeure, il n’est pas question de tout urbaniser. Nous croyons fortement en la complémentarité des sites, dont on veut garder la spécificité. Par exemple, Port-la-Forêt reste une place forte pour “l’intelligence” de course, avec notamment le pôle course au large, c’est intéressant de voir que Saint-Malo se développe petit à petit… Plus globalement, il y a une réflexion à mener sur l’avenir de la filière : que deviennent les bateaux demain ? Faut-il trouver de nouveaux matériaux ? De nouvelles pratiques pour l’événementiel ? On va travailler avec les classes, c’est une responsabilité collective de penser ce futur, les skippers sont d’ailleurs très alertes sur le sujet. Et je rappelle que la course au large est un laboratoire pour les nouvelles technologies, elle nous permet aussi de toucher à l’aéronautique, à la défense, au fret maritime… Après, peut-être qu’à un moment, on arrivera effectivement à saturation et qu’il faudra trouver d’autres lieux que la Bretagne, je me réjouis d’ailleurs de voir que les régions voisines s’investissent à leur tour dans cet univers. Mais je suis confiant sur le fait que les marins se rappelleront d’où ils viennent !